« La Saga des Héros de Sassoun » est un premier pas dans l’exploration à travers le temps de la légende arménienne « David de Sassoun ».
Le premier tome de cet ouvrage nous a fait prendre conscience que la légende arménienne, contrairement à d’autres légendes, n’a pas eu besoin de déluge pour améliorer le monde. Les ancêtres des Arméniens ont accepté le monde tel qu’ils l’ont découvert et s’y sont adaptés. Ils réalisèrent des inventions dans tous les domaines, apportant de ce fait une incontestable contribution à la création du berceau de la civilisation occidentale.
Deuxième tome :
David de Sassoun, troisième héros du Lac Van, vous fera découvrir le perpétuel combat, dans l’histoire antique, entre les sociétés sédentaires et les sociétés nomades. Chaque péripétie de la vie de David, son enfance pleine d’imprévus, son mariage avec Khanedout des Bleues Collines ou sa mort si tragique et si inattendue, exprime l’amour que les ancêtres des Arméniens vouaient à leurs terres et leurs montagnes. David incarnera cet amour.
Mehère-le-Jeune est le quatrième héros du Lac Van. Sa mission sera différente de celle de ses aïeux, car l’époque n’est plus la même. Le temps n’aura plus prise sur notre héros !
Non loin du Lac Van, méditant à l’intérieur du Rocher du Corbeau, oiseau ô combien symbolique pour toutes les civilisations antiques du monde, Mehère-le-Jeune incarnera l’espoir d’une vie paisible sur cette terre, ces montagnes et ces eaux qui ont captivé les ancêtres des Arméniens, depuis la nuit des temps.
Un mot au lecteur
Les récits qui composent la légende arménienne David de Sassoun ont été recueillis, pêle-mêle, dans toutes les régions de l’Arménie historique, surtout au 19ème siècle, directement de la bouche des conteurs.
Ensuite un énorme travail a été exécuté pour en faire un puzzle cohérent.
Cette mosaïque de récits et de chants a été une source d’inspiration pour de nombreux écrivains. Des traductions existent en différentes langues.
J’ai eu le bonheur de lire cette légende dans sa langue originale.
Au fur et à mesure de mes lectures, certains points attiraient mon attention : je sentais, je voyais cette légende autrement.
Les légendes sont nombreuses, mais celle-ci est bien différente ! En effet, dans la légende arménienne, nul besoin n’est d’anéantir le monde, par le déluge ou autres forces de la nature, pour en créer un meilleur : les ancêtres des Arméniens ont accepté le monde tel qu’ils l’ont découvert et s’y sont adaptés ; ils ont réalisé des inventions dans tous les domaines, apportant, de ce fait, une incontestable contribution à la création du berceau de la civilisation occidentale.
Alors, j’ai décidé d’explorer cette légende pour en trouver la source et je me suis lancé le défi de découvrir la chose ou le phénomène qui avait émerveillé ou effrayé les habitants de cette terre, et qui, pour cette raison, avait eu le mérite d’être raconté par certains d’entre eux.
Je vous révèle les principaux points qui ont permis ma propre interprétation de cette légende. Vous pouvez les découvrir dans le premier tome de la Saga des Héros de Sassoun.
Voyons tout d’abord ce qui a émerveillé ce peuple :
Le massif du mont Ararat, avec ses deux montagnes qui ressemblaient, et qui ressemblent toujours, à deux frères jumeaux, inséparables, protecteurs, magnifiques de beauté, de noblesse et de générosité.
Cet émerveillement a été le commencement de cette légende populaire : à l’image de ce massif, la légende des deux frères jumeaux, Sanassar et Bardassar, prendra forme… Leurs noms incarneront les roches et les troncs d’arbre de ces montagnes.
Plus tard, les noms de Grand Massis et de Petit Massis couleront de source !
L’apparition du lait à la naissance d’un bébé, humain ou animal. Ils en ont constaté l’importance pour la survie des progénitures, donc des espèces… Dans notre légende, la Source au Lait, en est l’expression.
Les reflets de la lumière sur la surface dulac de Van.
Le lac de Van a dû les surprendre par la vivacité de ses scintillements : on sait actuellement que son eau, peu salée, est extrêmement riche en sels minéraux… Ainsi, le reflet de la lumière sur ses vaguelettes créait une multitude de petits miroirs, calmes ou agités, qui leur apparaissaient tels des êtres vivants. C’est à cette époque que Dzovinar a dû naître…
Dzov = mer, lac, eau.
nar = feu, étincelle, lumière.
Cela donne : eau et lumière qui, à elles seules, définissent la vie…
Le phénomène de l’écho dans ce pays de montagnes, phénomène que leurs habitants ont dû exploiter à bon escient pour communiquer à distance. Dans notre légende, Ohane-à-la-voix-tonnante en est la preuve.
Les chevaux ! Les habitants de ces terres avaient été conquis par la beauté, l’intelligence et la fidélité de ce superbe animal. Grands éleveurs de chevaux et cavaliers émérites, ils avaient réussi, à des époques fort lointaines, à dresser leurs chevaux pour le combat : cavalier et monture s’entendaient parfaitement et ne formaient qu’un seul être. Ces chevaux étaient très appréciés et leur renommée avait atteint des distances fabuleuses ! Dans la légende, Djalali a été leur majestueux représentant.
La Foudroyante, les armes et les armures. Aucun archéologue ne contredira le fait que la métallurgie que ce peuple a créée est l’une des plus anciennes au monde. Leurs armes, l’épée courte en particulier, avaient une renommée inégalable surtout pour la qualité du métal obtenu pour fabriquer sa lame. La Foudroyante a traversé les siècles pour nous le rappeler.
Téchéba, le dieu de l’Orage, représenté debout surun taureau.
Il y a de cela plusieurs millénaires, ce dieu a été vénéré par les habitants de toute l’Asie Mineure et du Sud Caucase : successivement par les Hittites, les Hourrites et les Ourartéens. La légende populaire n’en parle pas, mais voilà ce que j’y ai vu :
La légende nous raconte que les Sassouniotes, en période de sécheresse, sacrifiaient un bœuf et offraient du hérissa, pour avoir de la pluie. Cette scène est relatée dans le second tome de la saga : on y voit Davids’emparer d’un chaudron à quatre poignées…
Or, nous savons à présent que les ancêtres des Arméniens, les Ourartéens, étaient renommés pour leurs chaudrons à quatre poignées, chaudron en bronze dont ils faisaient le commerce. Vous pouvez voir, au Musée des civilisations anatoliennes à Ankara, le magnifique « Chaudron d’Altintepe », chaudron en bronze, à quatre poignées représentant des têtes de taureau ! Le taureau était l’emblème du dieu Téchéba ! Que d’informations grâce à ces quatre poignées !…
Voyons à présent ce qui a effrayé ce peuple :
Les vents implacables qui soufflaient, et soufflent encore, sur les flancs de leurs montagnes. Dans la légende, ils sont représentés par « le démon blanc », que vous découvrez, dans le premier tome de la saga, sous le nom de Réchabar, Génie des Vents.
Pourquoi lui ai-je attribué ce nom ?
Le mot Réchabar est le nom d’un vent violent qui, jusqu’à nos jours, continue à dévaler les pentes des montagnes du Sud Caucase, provoquant toutes sortes de calamités, dont les avalanches… Or, si vous prononcez ce mot avec un h aspiré avant de prononcer le r , vous obtiendrez hrèch , un mot arménien qui signifie monstre, démon ; d’autre part, babbar signifie blanc, en sumérien…
D’où : rèchabar = démon blanc… et ce, depuis que ce vent souffle sur les pentes du Caucase…
Le monstre avaleur de toutes les sources, que Sanassar doit tuerpour redonner l’eau aux terres desséchées…
Il y a de cela plus de 3000 ans, les lointains ancêtres des Arméniens construisaient des barrages gigantesques pour assurer l’eau de leurs cités. Dans cette légende, le barrage a été vécu comme un monstre avaleur de sources. Qui dit barrage dit eau abondante pour certains, et assèchement des terres pour d’autres. Cela se voit même de nos jours.
La ville d’Airain, dans la légende est une ville ensorcelée, où les étrangers, qui n’avaient pu boire un baquet de lait avant d’y entrer, se voyaient transformés en vieillard à barbe et aux cheveux blancs… Sanassar, qui l’avait bu, avait été épargné.
- Editeur : Editions Sigest
- Auteur : Alice Varvarian
- Date de parution : 2008
- Format : 14,8 x 21 cm
- Nombre de pages : 232